Appel aux catholiques républicains

Je suis une catholique républicaine.

Consciente de la situation sanitaire et des dangers qu’elle implique pour chaque citoyen, consciente également des efforts considérables qui sont demandés à chaque citoyen, dans sa vie professionnelle comme privée, je souhaite me dissocier des manifestations réclamant l’autorisation de tenir des messes publiques.

J’estime qu’il n’est pas décent, dans les conditions actuelles, de réclamer des dérogations de ce type. Les églises ne nous sont pas fermées, notre liberté de croire n’est pas bafouée. Il s’agit ici uniquement d’une suspension temporaire (bien que longue, certes) du droit de rassemblement, et cela pour des raisons de santé publique. Rien dans la situation actuelle, bien qu’exceptionnelle, et difficilement concevable, ne se trouve aller à l’encontre du droit, de la république, et des libertés individuelles. 

À ceux qui s’insurgent d’être privés de leur appartenance car ils sont privés de communion, je répondrai que cette appartenance au Christ, qui est aussi la mienne, n’est que rematérialisée chaque dimanche, mais ne cesse jamais d’être. Nous sommes, et cela depuis notre baptême, des enfants de Dieu, des membres de l’Église. Si le rite est important pour faire communauté, pour se sentir proche les uns des autres et réaffirmer notre appartenance, celle-ci ne s’évapore pas entre temps. La prière individuelle, en église, nous est possible ; assister de manière virtuelle à des cultes, et recevoir ainsi la Parole, nous est possible ; prier les uns pour les autres nous est possible ; communiquer avec nos proches, prendre soin de nos aînés, aider les démunis, se mettre au service de la communauté d’une manière ou d’une autre, nous est possible. Alors, quel genre de foi vous anime si celle-ci ne signifie plus rien pour vous sans obtenir en échange un morceau de pain consacré ?

Quel genre de charité concevez-vous si vous ne pouvez faire ce sacrifice, quand certains en sont à perdre leur moyen de subsistance ? 

En termes d’appartenance, il est aujourd’hui question, justement, d’appartenir à quelque chose de plus grand, que nombreux semblent déconsidérer — ou pire, rejeter — une République indivisible, laïque, démocratique et sociale : la République française. Cette république qui est l’émanation d’un peuple, ou comme le suggérait assez justement Erik Orsenna mercredi dernier lors de la panthéonisation de Maurice Genevoix et de « Ceux de 1914 », des peuples qui font la France. Ces peuples réunis, ballotés par l’histoire, plus ou moins cohérents les uns avec les autres, c’est une partie de ceux-là que nous sommes, et peut-être, même certainement, appartenons-nous à plusieurs des composantes de ces peuples, selon notre âge, notre profession, nos origines, notre foi, nos opinions. Mais une chose est irrévocable, nous appartenons à cette France, qui aujourd’hui a besoin de la responsabilité et des efforts de chacun pour traverser le mieux possible cette crise planétaire. Car je le rappelle, cette situation est mondiale. Nous sommes tous dans le même bateau, si je puis m’exprimer ainsi. Dans ces circonstances hors du commun, il est peut-être temps d’appeler à la fraternité, et par cela l’arrêt de caprices communautaires, pour se lancer dans une aventure de foi. Celle d’espérer ardemment et résolument, de tout notre cœur et de toutes nos forces, que nous nous relèverons de tout cela.

Ces manifestations, je suis, donc, contre « au nom des trois vertus théologales, contre elle[s] dans la Foi, dans l’Espérance, et dans la Charité », pour citer André Malraux, dans L’espoir.


© Marie Bellando Mitjans

2 commentaires sur « Appel aux catholiques républicains »

    1. Bravo anne marie Pelletier, bibliste, récemment ds le quotidien la Croix partageait ce même élan. L evangile , c est en nous, par nous, avec les autres que nous le vivons et le communiquions. Vivons d abord du pain de la foi, l esperance, de la charité.

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